La démence, notamment la maladie d’Alzheimer, est souvent associée à la perte de mémoire.
Toutefois, ses effets ne se limitent pas à cette seule faculté cognitive. En effet, la démence affecte également le comportement d’une personne, provoquant de l’irritabilité, de la dépression, de l’anxiété ou même des changements de personnalité plus profonds.
Ces modifications comportementales peuvent bouleverser la vie des personnes concernées tout autant que la perte de mémoire ou les difficultés à penser clairement.
Un groupe de chercheurs de l’Université du Michigan a récemment publié une étude dans Alzheimer’s & Dementia: The Journal of the Alzheimer’s Association révélant de nouvelles pistes pour comprendre ce qu’il se passe dans le cerveau des personnes présentant les premiers signes de démence.
Le rôle de la protéine tau et du réseau de la saillance
Les scientifiques ont étudié les cerveaux de 128 personnes à un stade précoce de la démence en utilisant des techniques d’imagerie médicale avancées.
Leur objectif : découvrir un lien entre les symptômes comportementaux et un réseau cérébral crucial pour la communication, appelé réseau de la saillance.
Ce réseau aide à interpréter et à réagir aux événements extérieurs, tout en jouant un rôle lé dans la gestion des émotions et des pensées internes.
Les chercheurs ont observé que la perturbation du réseau de la saillance par la protéine tau, une protéine déjà connue pour son implication dans des stades plus avancés de la démence, était liée à l’aggravation des symptômes comportementaux.
“La pathologie de la protéine tau n’entraîne pas directement des symptômes comportementaux, mais elle provoque une dysfonction du réseau de la saillance. Plus ce réseau est affecté, plus les symptômes comportementaux sont graves”, explique Alexandru D. Iordan, neuroscientifique et auteur principal de l’étude.
Imagerie cérébrale et découverte des réseaux
Les chercheurs ont utilisé l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) pour analyser trois réseaux cérébraux.
Ils ont combiné ces données avec des résultats d’examens neuropsychologiques et des questionnaires comportementaux.
Ils ont également utilisé la tomographie par émission de positons (TEP) pour détecter la présence des protéines tau et amyloïde, cette dernière étant également associée à la maladie d’Alzheimer.
Parmi les trois réseaux étudiés, seul le réseau de la saillance a montré une corrélation entre son intégrité et la présence de tau ainsi que la gravité des symptômes comportementaux.
En revanche, le réseau par défaut, souvent impliqué dans la réflexion interne et la mémoire, semble jouer un rôle secondaire, tandis que le troisième réseau, le réseau fronto-pariétal, ne semble pas être lié aux symptômes comportementaux.
Vers de nouvelles approches thérapeutiques ?
Bien que cette étude ne démontre pas encore de lien de cause à effet, les chercheurs trouvent cette association entre la protéine tau, le réseau de la saillance et les changements comportementaux intrigante.
Ils préconisent des recherches supplémentaires, notamment pour étudier comment ces connexions cérébrales évoluent au fil du temps et comment elles pourraient être modulées pour ralentir l’apparition des symptômes.
Le Dr Iordan et son équipe souhaitent également tester des interventions non médicamenteuses comme la stimulation électrique ou magnétique du cerveau pour voir si elles peuvent ralentir ces changements comportementaux.
Ces techniques, guidées par imagerie, pourraient offrir de nouvelles perspectives thérapeutiques pour les patients atteints de démence à un stade précoce.
Vers une meilleure détection des signes précoces de la démence
Les tests sanguins détectant la protéine tau et amyloïde, de plus en plus accessibles, pourraient permettre une détection plus précoce des risques de démence en observant les changements comportementaux, avant même que les capacités cognitives ne soient touchées.
Cette approche pourrait aider à mieux comprendre les variations de l’apparition et de la progression des symptômes chez les patients.
Le Dr Iordan conclut avec optimisme : “Nos résultats nous fournissent une cible fonctionnelle pour une potentielle intervention. Nous sommes impatients de voir les résultats de notre prochaine étude sur la stimulation cérébrale et ses effets sur ces relations.”
Les travaux de l’équipe de recherche sur la cognition et les interventions neuromodulatrices (RP-CNBI), dirigée par Benjamin M. Hampstead, ouvrent ainsi de nouvelles perspectives dans le traitement des démences liées à Alzheimer, en misant sur des approches non pharmacologiques prometteuses.
Sophie est rédactrice spécialisée dans les thématiques de médecines douces sur le site visa-forme.fr. Elle s’intéresse particulièrement à l’Ayurvéda et étudie notamment son développement dans les sociétés occidentales.